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La Cour de cassation a validé la saisie de 5,54 bitcoins d’une personne soupçonnée d’avoir réalisé une opération de blanchiment de fonds issus d’un trafic de stupéfiants, dans la mesure où ce dernier n’était pas en mesure de rapporter la preuve de l’origine licite des fonds ayant servi à alimenter son compte.
Cass. crim., 15 févr. 2023, n° 22-81.326
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Dans une décision rendue le 15 février 2023, la chambre criminelle de la Cour de cassation s’est prononcée sur le financement de la criminalité et l’utilisation de la cryptologie pour préserver son anonymat.
Une société canadienne proposait des téléphones équipés de sa solution de chiffrement Sky ECC, permettant aux utilisateurs d’envoyer des messages de manière anonyme.
Des trafiquants utilisaient des adresses de cryptomonnaies pour financer leurs activités illégales, ce qui a été découvert par des enquêteurs lors d’une interception judiciaire en France des serveurs de la société canadienne.
En effet, après analyse de la blockchain, les enquêteurs ont identifié plusieurs adresses associées à des comptes Coinbase, dont celle de la personne saisie sur laquelle une somme de 5,54 bitcoins (environ 140 000 €) a été appréhendée.
Décision
Ce dernier interjeté un pourvoi pour contester l’ordonnance de saisie, invoquant des vices de procédure, ce qui n’a pas été rejeté par la Cour de cassation.
Selon la Haute Juridiction la personne saisie était incapable de justifier la provenance et l’origine des fonds saisis. De plus, elle a relevé que le transfert réalisé en faveur du saisi avait été effectué en utilisant deux moyens de cryptologie, dont l’un, le chiffrement Sky ECC, est connu pour être lié à la criminalité.
La Cour de cassation estime donc, compte tenu de ces circonstances, que la transaction effectuée avec ces moyens de cryptologie ne peut avoir d’autre justification que le blanchiment d’argent, qui est défini comme le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus provenant d’une infraction pénale ayant procuré un profit direct ou indirect à son auteur (Article 324-1, alinéa 1 du Code pénal)
La Cour de cassation applique ainsi la présomption d’origine illicite des biens et confirme la saisie.
Pour confirmer la saisie et rejeter le pourvoi, la Cour se base sur la « présomption d’origine illicite des biens », étant donné l’absence de preuve contraire apportée par le saisi. Cela lui permet de conclure que l’ensemble des actifs en bitcoins inscrits sur son compte Coinbase étaient le produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit, constituant ainsi l’infraction de blanchiment.
En conclusion, la présomption d’origine illicite du bien devrait être mise en œuvre par les enquêteurs lorsqu’ils identifient des indices suggérant l’association potentielle d’une infraction à l’utilisation de moyens de cryptologie, sauf si les utilisateurs sont en mesure de justifier l’origine licite des fonds, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.