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Le Conseil d’État vient de rendre une décision importante qui éclaire la distinction entre les aides à caractère commercial et celles à caractère financier au sein des groupes d’entreprises, en particulier dans le contexte des aides intra-groupe.
Conseil d’Etat, 29 décembre 2023, n° 455810 SA Compagnie Gerbais Danone
Table des matières
ToggleContexte législatif et réglementaire
Depuis le 4 juillet 2012, la législation française (CGI art. 39, 13) encadre strictement les aides intra-groupe. Elle établit un principe général selon lequel les aides à caractère financier ne sont pas déductibles. Il existe cependant des exceptions précises pour les entreprises en difficulté soumises à certaines procédures (sauvegarde, redressement, liquidation, ou conciliation).
Distinction entre aides commerciales et financières
Les aides sont considérées comme commerciales lorsqu’elles visent à:
- maintenir des débouchés, ou
- à préserver des sources d’approvisionnement, originaires des relations entre deux entreprises.
Une aide a un caractère financier si elle vise à sauvegarder la valeur des participations ou la pérennité d’une filiale.
Cas spécifique analysé
Une société française a accordé une subvention importante à sa filiale turque en difficulté. Elle a été octroyée pour lui permettre d’utiliser des marques, brevets, et savoir-faire pour produire et vendre des produits laitiers en Turquie.
L’administration fiscale avait considéré cette aide comme financière, limitant sa déductibilité.
La société française soutenait qu’elle avait un caractère commercial, visant à maintenir sa présence sur le marché turc et à générer des revenus futurs.
Décision du Conseil d’État
Le Conseil d’Etat n’a pas suivi la position de l’administration fiscale et a confirmé le caractère commercial de l’aide.
Il précise que l’intérêt financier d’un autre actionnaire dans la société bénéficiaire ne remet pas en cause l’intérêt commercial de l’aide. Le fait qu’aucune redevance n’ait été versée avant un certain temps ne change pas non plus cette qualification.
Selon le Conseil d’État, une aide peut être considérée comme commerciale si elle vise à sauvegarder les perspectives de développement d’une activité, même sans chiffre d’affaires immédiat ou paiement de redevances pour l’exploitation d’actifs incorporels.
Cette décision souligne l’importance de l’intention et des objectifs sous-jacents à l’octroi de l’aide dans la détermination de son caractère fiscal. Elle offre ainsi un éclairage sur la gestion des aides intra-groupe et leurs implications fiscales.